Nous poursuivons notre découverte du Chiapas en arrivant à San Cristobal de las Casas. Autrefois capitale du Chiapas pendant la période coloniale, cette ville fondée en 1528 et qui fut l’une des premières de la Nouvelle-Espagne est désormais la capitale culturelle de l’état. Avec son architecture coloniale et son ambiance festive, elle attire de nombreux touristes qui en font le point de départ de leurs diverses excursions dans le Chiapas. Nous décidons d’y rester deux nuits seulement, l’occasion de faire une petite révision de notre moto. San Cristobal de las Casas se situe à 2200 mètres, la moto n’est pas habituée à une telle altitude, et nous non plus ! Il y fait froid le soir, on peut voir des étales de pulls en laine dans la rue, destinés aux quelques malheureux n’ayant pas pensé à emporter de quoi se couvrir dans leur valise. Pour nous réchauffer, après une arrivée de nuit et sous la pluie, nous choisissons l’option vin rouge et tapas !
Le lendemain nous partons à la découverte de la ville, en flânant à travers les jolies rues pavées du centre-ville, pour une fois c’est agréable d’être piéton ! Nous nous arrêtons déjeuner dans un restaurant plutôt excentré, un peu caché, recommandé par René notre couch-surfeur de Comitan, l’occasion de découvrir la cuisine mexicaine de cette localité. Nous en profitons pour visiter le musée de la médecine Maya, ainsi que celui de l’ambre, une spécialité de l’artisanat chiapaneco. Le soir nous improvisons un repas composé de fromage, charcuterie et miel du Chiapas…un régal…le tout accompagné bien sûr d’une bonne bouteille de vin !
Le jour se lève à nouveau sur San Cristobal, nous avons récupéré notre moto qui se porte bien après plus de 2000km parcourus, et nous partons pour San Juan Chamula, un village indigène situé à une dizaine de kilomètres de la ville. Nous arrivons au pied de l’église San Juan Bautista de laquelle nous voyons sortir de nombreuses personnes formant partie de la communauté indigène Tzotziles en habits traditionnels notamment des musiciens munis de guitares, d’un accordéon, et de tambours. Visiblement, nous avons raté la cérémonie !
Nous décidons de rentrer quand même dans cette église qui ne laisse personne indifférent afin d’observer les rites de cette communauté. Nous restons assez décontenancés par ce que nous voyons : les bancs ont été retirés et des aiguilles de pins tapissent le sol recouvert de bougies. Des familles réunies prient des saints catholiques en langue indigène. De nombreuses bouteilles de soda, Coca Cola notamment, sont disposées sur le sol. Elles ont, paraît-il, des vertus « médicinales » car les gaz qu’elles génèrent permettraient d’extraire le mal du corps de la personne qui en boit. Selon les croyances Tzotziles, si une personne est malade, afin qu’elle guérisse, on sacrifie une poule s’il s’agit d’une fille, un coq s’il s’agit d’un garçon, ce qui permet d’éliminer le mal. Les poules sont donc présentes dans l’église également.

Nous sortons de ce lieu avec un sentiment mitigé, l’amer constat de la colonisation qui a imposé à cette communauté une religion hybride, éloignée de ses origines. Les aiguilles de pins rappellent la montagne où cette communauté avait l’usage de prier avant l’évangélisation. L’intervention de Coca cola dans au sein de rituel religieux reste un comble ! D’autant plus du fait de son utilité médicinale alors que le Mexique est le deuxième pays d’obésité au monde, avec un taux record de diabète, notamment à cause de la surconsommation de soda. Avant de rentrer à San Cristobal, nous faisons un détour par Zinacantán, un autre village indigène réputé pour ses ateliers de tissages. Nous nous arrêtons faire quelques emplettes auprès d’une couturière locale.
Nous quittons San Cristobal de las Casas avec pour objectif de nous rendre à Palenque, à la limite de la péninsule du Yucatan. Nous faisons étape à Ocosingo après quatre heures de route, puis reprenons notre chemin le jour suivant, et profitons pour nous arrêter à Agua Azul, de magnifiques cascades au cœur de la montagne. En saison sèche, l’eau y est bleu turquoise. Même si nous n’avons pas la chance de la trouver ainsi, l’endroit demeure pittoresque et très beau et nous pouvons nous rafraîchir en nous baignant sans personne autour de nous. Eh oui, c’est l’avantage de s’y rendre hors saison !
Alors que nous traversons de petits villages au bord de route, nous observons de nombreuses habitations de fortune, faites de taule ou de bois, qui rendent compte de la pauvreté de l’état du Chiapas. C’est ici que l’on retrouve l’EZLN (Ejercito Zapatista de Liberation Nacional), l’armée zapatiste de libération nationale, un groupe révolutionnaire, à la fois politique et militaire qui défend notamment les droits des indigènes dans cette région. Alors que nous ne sommes plus qu’à une heure de route de Palenque, nous rencontrons un barrage routier de plusieurs kilomètres et plusieurs heures d’attente. Heureusement, après quelques négociations – et parce que nous sommes à moto – on nous laisse passer ! Nous arrivons sereinement dans la ville de Palenque, et décidons de dormir dans un campement situé non loin de la zone archéologique, dans la jungle mexicaine, en compagnie des singes hurleurs qui de fait, ne nous ont pas laissé beaucoup de répit !
Cliquez sur Lecture pour écouter le cri des singes hurleurs.
Palenque, fondée à l’époque préclassique (100 avant JC) et qui s’est étendue jusqu’au IXème siècle, est une ancienne cité Maya dont le patrimoine architectural est très bien conservé. On y trouve de nombreux temples dont certains situés dans la jungle environnante. Il s’agit d’un site que nous trouvons exceptionnel et étonnamment peu peuplé de touristes…nous apprendrons par la suite qu’en raison des barrages zapatistes les lieux attirent moins de voyageurs. Le soir, nous allons dîner dans un restaurant aux spécialités Maya. Nous dégustons deux excellents cocktails ; le Jaguar et l’Elixir.
Palenque est également le point à partir duquel nous entamons notre retour. Obligés de repasser par Ocosingo, nous faisons toutefois une pause pour admirer les cascades Misol Há.
Nous profitons également de ce deuxième passage dans cette même ville pour nous rendre le lendemain sur le site archéologique de Toniná, ancienne cité maya de la période classique tardive et qui en 750 parvint à rivaliser avec Palenque, contribuant à son déclin. Ce site très peu fréquenté, pourtant gratuit, est superbe et offre une jolie vue sur la campagne du Chiapas, un état résolument très vert, où l’on retrouve beaucoup d’agriculture et d’élevage.
Après être brièvement repassés par San Cristobal de las Casas, nous nous rendons à Chiapa de Corzo, qui fut la première ville établie par les Espagnols dans l’état du Chiapas. Sur la place principale est érigé La Pila, un monument artistique, en pierre, au sein duquel se loge une jolie fontaine. On peut également y visiter quelques églises et temples de style colonial. Chiapa de Corzo se situe à 15 kilomètres de Tuxtla, la capitale administrative de l’état, où nous passons la soirée.
Il s’agit de notre dernière nuit dans le Chiapas, nous avons décidé de rejoindre ensuite la ville de Oaxaca de Juárez, joyaux culturel.